Que veut le Mouvement pour le socialisme ?
Le Mouvement pour le socialisme (MPS/BFS) est une organisation écosocialiste et féministe active dans toute la Suisse. Nous participons aux mouvements sociaux et encourageons ainsi l’auto-organisation des exploité-e-s et des opprimé-e-s dans le but de notre auto-émancipation et du dépassement du capitalisme. La construction d’une organisation révolutionnaire est pour nous un moyen d’atteindre ce but.
1. Le système que nous critiquons. 1
2. L’objectif que nous visons. 2
3. L’héritage que nous défendons. 2
4. La stratégie que nous suivons. 3
5. L’organisation que nous construisons. 3
1. Le système que nous critiquons.
Le capitalisme, système organisé sur la base de la propriété privée des grands moyens de production, d’échange et de crédit, génère de plus en plus de crises sociales, économiques et environnementales. Une stabilisation de l’état de crise globale du capitalisme n’est pas en vue. Au contraire, il faut s’attendre à des crises multiples et aggravées. Les tensions impérialistes croissantes, la montée des autoritarismes et les campagnes mondiales de réarmement massif (encore renforcées par la guerre d’agression russe contre l’Ukraine) trouvent leur pendant dans un durcissement de la politique de démantèlement social à l’intérieur. Cela constitue un terreau fertile pour la division et l’isolement des salarié-e-s, le nationalisme et la lutte culturelle virulente de la droite contre les acquis du mouvement féministe et queer-féministe.
L’origine des guerres, des dépendances néocoloniales, des pandémies et des perturbations socio-écologiques est liée au fonctionnement de la société capitaliste. La concurrence dans l’économie de marché, avec la contrainte qui en découle d’accumuler les profits, entraîne une course frénétique du capital tout autour du globe. Ceci a pour conséquence une pression à l’exploitation la plus brutale et la plus rentable possible de la main-d’œuvre et des ressources naturelles. Toute la richesse des sociétés capitalistes repose en effet sur l’exploitation de la nature et de la force de travail, qui doit être reproduite quotidiennement. En bref, les travailleuses et travailleurs doivent être nourri-e-s, soigné-e-s et reposé-e-s. En société patriarcale, la charge de ce travail de reproduction sociale est principalement reportée sur les personnes assignées femmes dans l’ordre binaire des sexes dont le travail est soit non-rémunéré, soit mal rémunéré. Sans reproduction quotidienne de cette main-d’œuvre, la machine d’accumulation capitaliste ne peut pas tourner.
Les ruptures que cela provoque dans le « métabolisme entre l’homme et la nature » (Marx) se traduisent par des bouleversements sociaux d’une ampleur inouïe. Les personnes vivant dans les pays dépendants sont encore beaucoup plus touchées que celles vivant dans les centres occidentaux. L’émergence du capitalisme est étroitement liée à l’ordre patriarcal, à l’esclavage moderne, à l’assujettissement colonial, à la formation des États-nations, au racisme et à la politique impérialiste. C’est sur cette base que le capitalisme continue à se reproduire défendent un changement fondamental. La structure sociale bourgeoise et ses institutions servent au maintien de la domination capitaliste. Comme le capitalisme, elles résultent d’une évolution historique – et peuvent donc être surmontées.
La variante actuelle, néolibérale, du capitalisme accentue à l’extrême la répartition inégale des richesses. La contradiction entre un mode de production et de distribution organisé à l’échelle mondiale et l’appropriation privée de ses fruits ne cesse d’accroître les inégalités à travers le monde, renforçant le clivage entre deux classes sociales antagonistes : la classe de ceux qui possèdent les richesses de la société (la bourgeoisie) et la classe des personnes qui ne possèdent rien mais qui produisent les richesses sociales (la classe ouvrière).
Dans la crise climatique, cette contradiction de classe apparaît de manière particulièrement flagrante. L’exploitation capitaliste de la nature détruit la vie sur l’ensemble de la planète. Le processus d’accumulation capitaliste ne laisse plus de temps pour des réformes et des compromis qui pourraient, dans le meilleur des cas, ralentir le réchauffement climatique. La crise climatique met en lumière deux camps. D’un côté, il y a ceux qui défendent le système actuel, bien que la logique de ce système soit incompatible non seulement avec la préservation de l’environnement et de la biodiversité, mais aussi avec la satisfaction des besoins sociaux fondamentaux des êtres humains. De l’autre côté, il y a ceux qui, comme nous, défendent un changement fondamental du système. Les luttes actuelles sur des questions économiques et sociales concrètes se transforment en mouvements politiques appelant à un projet de société radicalement différent de celui qui existe actuellement. Ces mouvements politiques mondiaux sont les moteurs d’un avenir digne d’être vécu, car ils s’orientent vers la perspective d’une autre société, écosocialiste, qui rompt avec le modèle économique et social capitaliste, polluant et dangereux pour la vie. Cela présuppose l’existence et l’affirmation d’un projet politique anticapitaliste. C’est l’objectif que poursuit le Mouvement pour le socialisme (MPS/BFS).
2. L’objectif que nous visons.
Les conceptions alternatives de la société ne se conçoivent pas en détail à l’avance. Tout comme la société bourgeoise-capitaliste, la société socialiste ne se dessine qu’à travers la confrontation entre les classes sociales, c’est-à-dire à travers la lutte des classes. Les visions émancipatrices sont toutefois importantes en tant que points de repère pour les mouvements sociaux et les organisations. C’est un grand problème pour la gauche que de telles « visions d’une vie bonne pour tou·te·x·s » soient actuellement quasi inexistantes dans la société. Pour de nombreuses personnes, la fin du monde est plus facile à imaginer que la fin du capitalisme. Nous devons dès lors penser une société sans exploitation ni oppression, puisque nous savons qu’il ne peut y avoir de belle vie dans un système truqué.
La socialisation des sphères centrales de production et de reproduction, avec l’abolition de la propriété privée des moyens de production, ainsi que la transformation et démantèlement des industries polluantes sont les conditions préalables à une planification sociale et écologique de l’économie, fondée sur la démocratie de base. L’objectif est une gestion durable des ressources naturelles et humaines et l’abolition des rapports de genre patriarcaux. Nous aspirons à une société dans laquelle le but de la production économique est la satisfaction des besoins de la société et non le profit. La prospérité ne doit pas être définie en termes monétaires, mais par le fait de disposer de plus de temps libre. Un écosocialisme démocratique signifie pour nous un monde dans lequel l’épanouissement de chacun-e est la condition de l’épanouissement de toutes et tous.
L’écosocialisme doit devenir un élément fédérateur entre les mouvements d’émancipation et les organisations politiques. La diversité des mouvements et l’auto-organisation sont la clé pour que l’écosocialisme puisse devenir une perspective d’action pour la gauche. La libération de la classe ouvrière ne peut être que l’œuvre des personnes exploitées et opprimées elles-mêmes.
3. L’héritage que nous défendons.
Nous nous inscrivons dans la tradition du mouvement ouvrier, des mouvements féministes et écologistes, mais aussi des luttes de libération anticoloniales des 19e et 20e siècles. La fondation du MPS/BFS en 2002 repose sur la conviction que la social-démocratie et les variantes communistes-staliniennes du mouvement ouvrier ont complètement échoué. Tant la social-démocratie réformiste, aujourd’hui néolibérale, que les soi-disant socialismes réels ont discrédité la vision d’un socialisme démocratique, fondé sur la liberté individuelle et collective. Le MPS/BFS fait partie d’une nouvelle gauche qui surmonte cet héritage problématique. Repenser le socialisme pour le 21e siècle, telle est notre ambition.
Les organisations qui ont précédé le MPS/BFS étaient la Ligue marxiste révolutionnaire (LMR) et le Parti socialiste ouvrier (PSO). Le MPS/BFS s’appuie sur les principes fondamentaux du marxisme révolutionnaire. Nous rejetons les conceptions autoritaires, bureaucratiques et répressives du « socialisme » et nous nous considérons comme anti-stalinien-ne-s. Nous défendons une culture de discussion démocratique, ouverte et pluraliste au sein de notre organisation, qui permet également l’expression de positions minoritaires. En outre, nous rejetons toute pensée campiste, qui a défini la gauche pendant la guerre froide et qui connaît aujourd’hui une résurgence déplorable. Nous défendons un anti-impérialisme solidaire, qui s’oriente vers les besoins des salarié-e-s touché-e-s par la guerre et l’exploitation, et non vers les intérêts d’une quelconque puissance impérialiste ou d’un quelconque gouvernement bourgeois. Nous soutenons les droits à l’autodétermination des peuples et à l’auto-défense contre toute agression guerrière.
Contre les attaques patronales, la transformation néolibérale de l’État, la montée de la droite et le danger fasciste imminent, nous préconisons une large unité d’action de la gauche, ce que l’on appelait traditionnellement une politique de front unique. L’héritage sans doute le plus important du mouvement marxiste-révolutionnaire, l’internationalisme assumé et concret, fait partie de l’ADN de notre organisation.
Tout en nous inscrivant dans la tradition d’un marxisme révolutionnaire, anti-autoritaire et démocratique, nous pensons que le renouvellement d’un projet anticapitaliste auquel nous aspirons ne peut se faire sans une réinvention théorique et pratique.
4. La stratégie que nous suivons.
L’horizon politique du MPS/BFS et son objectif fondamental est la rupture avec le capitalisme. Nous sommes révolutionnaires, c’est-à-dire pour la conquête du pouvoir par les salarié-e-s et toutes les autres personnes qui sont opprimées et exploitées de différentes manières par ce système.
Notre hypothèse stratégique est que la lutte des classes entre le travail et le capital – les luttes contre l’oppression et l’exploitation sous leurs différentes formes – façonne le cours de l’histoire et constitue in fine le levier de changements sociaux fondamentaux. La lutte des classes est donc le centre de gravité de notre action politique. Cela signifie concrètement que le sujet social du changement est toujours représenté par les travailleur-euse-x-s, les exploité-e-x-s et les opprimé-e-x-s dans toute leur diversité, qui prennent en main leur propre destin. Aucune alternative au régime capitaliste ne peut être conçue et construite sans s’appuyer sur l’action collective et l’intelligence – pratique et théorique – de celleux qui travaillent et produisent la richesse sociale.
L’hypothèse stratégique du MPS/BFS part donc du principe que toute transformation révolutionnaire de la société ne peut se faire sans la multiplication et le développement des luttes sociales, parce que nous sommes convaincu-e-s que ces luttes portent en elles les germes d’une société solidaire. L’objectif de notre travail politique est de promouvoir l’auto-organisation des opprimé-e-s et des exploité-e-s ainsi que de stimuler et de radicaliser leurs luttes sur la base de revendications transitoires qui répondent à leurs besoins réels tout en entrant en conflit avec le capitalisme. L’auto-organisation et la promotion de perspectives anticapitalistes sont pour nous les clés du changement du rapport de force social, ce qui permet de construire petit à petit un contre-pouvoir à la domination bourgeoise.
Enfin, les organisations de salarié-e-s doivent acquérir la force de constituer un double pouvoir parallèle à celui de l’État bourgeois. Au moyen d’un mouvement de grève massif, nous devons nous rendre capables de défier le pouvoir du capital et de la bourgeoisie et de remplacer les formes bourgeoises de gestion politique par une démocratie ouvrière. La destruction de l’État bourgeois est la condition préalable pour rompre avec le capitalisme, c’est-à-dire s’approprier les richesses de la société et construire un ordre social véritablement démocratique, socialiste et durable.
Nous sommes conscient-e-s que les salarié-e-s sont aujourd’hui loin de remplir cette condition et il est difficile de savoir comment résoudre le problème dans un délai raisonnable. La complexité de la situation économique et sociale, le niveau insuffisant d’organisation collective dont disposent aujourd’hui les salarié-e-s ainsi que les attaques incessantes du patronat et des partis de droite rendent cette tâche difficile. De notre point de vue, il est néanmoins nécessaire de défendre aujourd’hui l’écosocialisme – toute autre approche serait illusoire. Dans le cadre de notre activité politique, nous nous efforçons de prendre des initiatives et de faire des propositions qui permettent aux salarié-e-s de défendre leurs intérêts actuels et de progresser vers la réalisation d’une alternative écosocialiste.
5. L’organisation que nous construisons.
Pour tenter de mettre en œuvre la stratégie développée ci-dessus et rompre avec le capitalisme, il faut un instrument politique, c’est-à-dire une organisation révolutionnaire. En ce sens, le MPS/BFS s’investit dans des luttes qui correspondent à son horizon anticapitaliste et à son hypothèse stratégique. Bien entendu, le rôle et l’action d’une organisation anticapitaliste dépendent également de l’évolution historique des rapports de force, du niveau de développement de la conscience de classe générale et d’autres facteurs.
Le plus grand obstacle à la construction d’une organisation révolutionnaire en Suisse est la stabilité politique et économique unique au monde du régime bourgeois local. Cette stabilité repose sur un fédéralisme prononcé, le système de concordance et la démocratie parlementaire semi-directe, qui ont un effet intégrateur. Cette combinaison s’avère être un avantage concurrentiel pour le capital impérialiste suisse, tout comme la fiscalité peu élevée, la place financière et le négoce des matières premières faiblement réglementés, la bonne infrastructure payée par les pouvoirs publics, la proximité entre les entreprises privées et les instituts de recherche publics, le partenariat social marqué ainsi que les conditions de travail collectives insuffisamment réglementées (longues heures de travail, protection contre le licenciement inexistante, etc.). La stabilité des conditions favorise l’implantation de multinationales et fait de la Suisse un pays riche ainsi qu’un élément important de l’ordre impérialiste-capitaliste mondial.
En raison des privilèges matériels relatifs dont ils disposent, une grande partie des salarié-e-s en Suisse ont moins tendance à passer à l’action, même si leur force de travail est exploitée au moins aussi efficacement qu’ailleurs. Connaître les conditions socio-politiques spécifiques à la Suisse et leur positionnement dans le contexte international est une condition préalable pour développer des réponses et des activités politiques appropriées. Réfléchir pour agir, agir en réfléchissant est notre ligne de conduite révolutionnaire.
Dans le contexte actuel et à moyen terme, le MPS/BFS considère comme décisif l’objectif de renforcer sa construction au niveau national, avec des liens étroits au niveau international, en consolidant et en développant les sections déjà existantes, en favorisant simultanément l’émergence de nouvelles sections ou en soutenant de nouveaux collectifs anticapitalistes dans la perspective d’une collaboration immédiate avec le projet national du MPS/BFS. Pour ce faire, l’action du MPS/BFS doit se concentrer sur certaines priorités d’action essentielles.
Propager les revendications transitoires anticapitalistes
Le MPS/BFS déploie une large propagande anticapitaliste. Cette action de propagande doit être mise en œuvre à travers la production de matériel politique (sites web, tracts, analyses, etc.), mais surtout à travers ses propres militant-e-s qui jouent un rôle actif dans les mouvements sociaux. Pour cela, il faut utiliser tous les canaux et toutes les occasions. En ce sens, nous réaffirmons notre refus de considérer le travail institutionnel-parlementaire comme un domaine d’intervention prioritaire. Cependant, nous estimons que les instruments de la démocratie bourgeoise peuvent également offrir des espaces utiles pour mener notre action de propagande (participation dans les législatifs, recours au référendum ou aux initiatives populaires locales). Pour nous, une activité parlementaire ne peut être conçue que sous forme d’une tribune pour amplifier notre travail de propagande. De même, le lancement d’un référendum doit être utilisé comme un instrument pour une campagne active sur des questions d’intérêt pour les salarié-e-s, en profitant de l’occasion pour nouer des contacts, pour intégrer de nouveaux et nouvelles militant-e-s dans notre organisation. En revanche, nous considérons que l’assimilation de l’intervention parlementaire à une trahison réformiste, comme le font de nombreuses mouvances extra-parlementaires de gauche, n’est pas d’une grande aide pour le développement d’un contre-pouvoir anticapitaliste.
Stimuler les dynamiques d’auto-organisation et de mobilisation collectives
Nous participons activement aux mouvements et aux luttes sociales (syndicats, grèves du climat, grèves féministes, collectifs de base, etc.), sommes prêt-e-s à apprendre et à faire des propositions tout en évitant de donner des leçons aux autres militant-e-s. Nous considérons cependant qu’il est de notre devoir d’intervenir dans les mouvements et de les faire progresser par le biais de revendications anticapitalistes transitoires – dans une logique de confrontation avec les patrons et les gouvernements à leur service. Pour ce faire, le MPS/BFS analyse l’évolution de la société, les antagonismes potentiels, les signes de la disposition de certains secteurs de la population à s’engager sur la voie de la mobilisation et de la lutte, puis y participe activement.
C’est sur la base de ces hypothèses et d’une réflexion politique collective que le MPS/BFS soutient la participation de ses militant-e-s aux structures du mouvement syndical, même si celui-ci traverse une phase de dégénérescence de plus en plus avancée, de subordination de plus en plus marquée aux intérêts du patronat. Nous considérons que les structures syndicales offrent encore pour l’instant la possibilité d’entrer en contact avec les salarié-e-s et de construire des luttes susceptibles de réveiller leur conscience de classe. Pour le MPS/BFS, il existe des champs d’intervention privilégiés (entre autres les mouvements féministes, écologiques, antiracistes et syndicaux), mais il n’en exclut fondamentalement aucun, afin de favoriser les dynamiques d’auto-organisation et de mobilisation collectives.
Favoriser l’émergence de collectifs d’avant-garde et renforcer ainsi notre projet anticapitaliste
Le MPS/BFS contribue à l’organisation et à la coordination des secteurs les plus avancés des différents mouvements sociaux. Nous parlons ici de collectifs d’avant-garde dans le sens de cadres organisateurs de la classe ouvrière, et non d’avant-gardes autoproclamées de partis. Il ne s’agit pas d’hégémoniser ces avant-gardes mais de collaborer avec elles et de promouvoir leurs activités dans une perspective anticapitaliste. Nous souhaitons agir pour que le MPS/BFS devienne une alternative anticapitaliste pour les secteurs les plus avancés de ces mouvements, une alternative aux organisations qui défendent un néolibéralisme atténué ou une approche sociale-démocrate réformiste. Ce travail sert à donner une continuité et une perspective politique à ces réseaux militants même dans les phases de repli cyclique des grandes mobilisations sociales, afin d’éviter ainsi la fragmentation ou même l’abandon du militantisme politique. Par cet engagement, le MPS/BFS pourra aussi gagner de nouveaux-elles militant-e-s à son projet politico-organisationnel. Nous nous revendiquons comme un point de cristallisation ainsi qu’une mémoire collective des mouvements sociaux.
Construire une organisation pour le 21e siècle
Au cours de notre existence, nous avons développé une aversion aussi bien pour les donneurs de leçons de gauche qui entendent prédire le cours de l’histoire que pour les organisations qui se considèrent comme le nombril de la théorie révolutionnaire et comme « l’avant-garde du mouvement prolétarien » et qui en déduisent une prétention absolue à sa direction. Nous sommes plus modestes et reconnaissons que la gauche révolutionnaire mondiale est dans le pétrin et que nous ne faisons pas exception. Dans cette situation, nous considérons qu’il est plus honnête d’admettre que nous nous trouvons dans un processus de recherche théorique et pratique. Il nous semble naturel que cette recherche fasse émerger des opinions et des positions différentes, qui ont leur place au sein du MPS/BFS et qui sont discutées démocratiquement. Il n’est ni réaliste ni souhaitable de développer une ligne de parti monolithique.
La crise du capitalisme exige d’une organisation révolutionnaire non seulement la fermeté des principes, mais aussi l’ouverture à s’adapter aux nouvelles conditions, à réagir aux évolutions, ainsi que la capacité à jeter par-dessus bord les vieilles certitudes. Le marxisme doit rester un point de référence pour les mouvements d’émancipation au cours de ce siècle. Pour cela, les marxistes-révolutionnaires doivent intégrer la critique féministe de l’organisation patriarcale-capitaliste de la reproduction sociale, les objections écologiques aux idées productivistes au sein de la gauche, ainsi que les pratiques antiracistes et anticolonialistes.
En Suisse, le mouvement de la Grève féministe s’est imposé comme la force mobilisatrice et politique de gauche la plus puissante depuis la Grève générale de 1918. Il influence tant le débat public que les organisations politiques et syndicales à l’échelle nationale. Le mouvement fait également évoluer les mentalités, politise et radicalise le pays. Pour construire une organisation révolutionnaire au 21e siècle, il est indispensable de nous inscrire dans ses modes d’organisation, notamment les principes de fonctionnement tels que la démocratie interne, l’horizontalité et la bienveillance, avec lesquels les militant-e-s s’organisent. Au sein de notre organisation et dans nos échanges avec d’autres militant-e-s, nous accordons une grande importance à des relations humaines respectueuses. Une bonne culture de la discussion inclusive est pour nous un principe de fonctionnement incontournable. Les contraintes quotidiennes du capitalisme et les failles de la société ne sont pas sans effet sur nous, militant-e-s, et entraînent des défis psychologiques. Une organisation qui veut être à la hauteur du 21e siècle doit en tenir compte. Aujourd’hui, la discipline révolutionnaire signifie également être attentifs-ves aux diverses sensibilités au sein du collectif révolutionnaire.
Mouvement pour le socialisme, automne 2023