Crise bancaire en Suisse : la socialisation plutôt que le colosse monstrueux !

Depuis le dimanche 19 mars 2023, il est clair que la grande banque suisse en crise Credit Suisse sera reprise par sa concurrente UBS. Mais ce nouveau colosse monstrueux n’a vu le jour que parce qu’une fois de plus, l’État suisse s’est engouffré dans la brèche et que les salarié-e-s sont donc obligés par le gouvernement de prendre en charge une partie des pertes d’une grande banque. La population paie donc pour l’échec des banques et assure les bonus et les dividendes des responsables de l’effondrement.
Du BFS/MPS Zurich
Pas de socialisation des pertes : nous ne paierons pas vos crises !
Dimanche soir, le Conseil fédéral suisse, les dirigeant·e·s de la Banque nationale et de l’Autorité de surveillance des marchés financiers (Finma) ainsi que les deux présidents Axel Lehmann (CS) et Colm Kelleher (UBS) ont annoncé que le Credit Suisse (CS) serait absorbé pour trois milliards de francs. Ce rachat n’a toutefois été possible que parce que la Confédération a accordé à UBS des garanties d’un montant de 259 milliards de francs [NDLR : le Conseil National s’est opposé le 11.04.2023, 102 voix vs 71, à 109 milliards de crédit parmi les garanties promises par la Confédération, de manière symbolique car l’argent avait déjà été débloqué par une mesure d’urgence]. Les pouvoirs publics participent à hauteur de neuf milliards aux pertes du CS et 250 milliards sont mis à la disposition des deux banques sous forme de crédits pour lesquels la Confédération et la Banque nationale se portent garantes. Cela signifie que les éventuelles pertes de crédit seront prises en charge, ce qui devrait être très probable, notamment si la crise financière (qui a débuté aux Etats-Unis après la faillite de la Silicon Valley Bank) devait se poursuivre. Ce sont donc une fois de plus les salarié·e·s suisses qui paient les conséquences de l’arnaque privée avec leurs impôts. De plus, plus de 10’000 employé·e·s de banque seront licencié·e·s dans les prochains mois, dont des dizaines d’apprentis du CS qui ne seront pas repris par l’UBS.
Bien qu’ils aient mené un groupe financier mondial dans le mur et enregistré 3,2 milliards de francs de pertes au cours des dix dernières années, le conseil d’administration et les managers du CS n’ont rien à craindre. Durant la même période, le CS a versé des dizaines de milliards de bonus. Voilà pour la « responsabilité entrepreneuriale ». Le comble de l’insolence est que le CS a annoncé, juste après son rachat par l’UBS, qu’il continuerait à verser des bonus. Le prochain tour de « l’enrichissement sur le dos de la collectivité » était déjà prévu pour le 24 mars.
L’Etat de droit bourgeois est une farce
Il est en outre remarquable de voir le peu de considération que les autorités suisses ont pour leur propre Etat de droit, lorsque leurs ami·e·s de l’économie privée sont en difficulté. Comme lors du sauvetage de l’UBS en 2008, le Conseil fédéral a décidé de sauver le CS par le biais du droit d’urgence, passant outre le Parlement et la population. La Commission de la concurrence, qui dans la logique libérale devrait contrôler de telles fusions et lutter contre la formation de monopoles, a été reléguée au statut d’observateur. Et le droit des actionnaires a été balayé d’un revers de main afin d’éviter un veto des actionnaires de la banque.
Les protagonistes et les politiciens bourgeois justifient cette manœuvre antidémocratique par la stabilité des marchés financiers, qui serait menacée par un effondrement incontrôlé du CS. Les autorités suisses n’auraient pas eu d’autre choix que de sauver le CS avec de l’argent public, au risque de provoquer un séisme mondial sur les marchés financiers.
Les contraintes capitalistes – et non pas des cercles d’élites indéterminés comme les récits de conspiration voudraient le faire croire – prennent la population en otage comme lors du sauvetage de l’UBS en 2008. La stabilité du marché financier n’est aussi qu’une autre formule pour garantir les profits des groupes et l’enrichissement des riches.
Une chute annoncée
La chute du CS est la fin d’une longue chaîne de scandales, de corruptions et de spéculations auto-infligées au cours des dernières années.
- En 2019, l’affaire Spygate a révélé que Tidjane Thiam, alors CEO du CS, avait fait espionner le chef de la gestion de fortune Iqbal Khan, de peur que celui-ci n’emporte des informations confidentielles avec lui chez son nouvel employeur (UBS).
- En 2021 et 2022, le CS a spéculé et a perdu des milliards lors de la faillite des fonds spéculatifs américains Archegos (2021) et de la société financière Greensill (2022).
- En 2022, des journalistes ont révélé dans les « Suisse Leaks » comment le CS courtisait encore aujourd’hui des dictateurs et des criminels en tant que clients et les aidait à cacher et à blanchir leurs fonds.
- Enfin, les pratiques criminelles du CS l’ont conduit à être condamné par la justice dans plusieurs cas et à devoir payer des amendes et des dommages-intérêts de plusieurs milliards pour avoir négligé son devoir de diligence et permis ainsi le blanchiment d’argent et la fraude fiscale.
Tout cela a eu pour conséquence que les clients ont retiré leurs fonds du CS, que la banque a connu des problèmes de liquidités malgré les fonds propres disponibles et qu’elle a finalement couru le risque de ne plus pouvoir honorer ses obligations courantes. Et malgré tous ces scandales, tant le président du CS Lehmann que les autorités suisses ont le culot d’affirmer lors de la conférence de presse du 19 mars que ce sont surtout des « rumeurs sur les réseaux sociaux » qui ont provoqué l’effondrement du CS.
Concentration du capital
Chaque crise entraîne également une concentration et une centralisation accrues du capital. Les secteurs économiques et les entreprises qui meurent sont éliminés, mais en même temps, de nouveaux investissements sont réalisés grâce à des aides directes ou indirectes de l’État. Les entreprises sont rachetées et leurs parts de marché sont absorbées. Les « maîtres du marché » (ici UBS) peuvent ainsi concentrer encore plus de richesses et de pouvoir entre leurs mains. Ils essaient en permanence d’augmenter leur productivité (augmentation de la production de biens ou de services dans un temps donné) ainsi que leur rentabilité (taux de profit).
La reprise du CS donne naissance à un colosse financier qui sera encore plus « too big to fail ». Les affirmations des autorités suisses selon lesquelles UBS élargie doit encore augmenter ses fonds propres et que les réglementations étatiques du marché financier doivent être encore renforcées n’y changent rien. L’effondrement du CS, qui n’aurait pas dû se produire selon les exigences imposées aux banques depuis la crise financière et économique de 2007/08, montre que ces réglementations restent des tigres de papier pour les grandes banques.
Pour la socialisation du secteur financier !
Le Conseil fédéral a montré qu’il est en principe possible pour un gouvernement d’agir rapidement et de débloquer des milliards, lorsqu’il y a le feu et que, par exemple, la chute de l’un des plus grands pollueurs climatiques du pays (le CS) se profile. La grève du climat suisse a donc demandé, à juste titre, sur les réseaux sociaux si nos bases vitales n’étaient pas elles aussi « too big to fail » ? Parallèlement, le comportement de l’Etat suisse montre que celui-ci n’est pas une entité neutre, que l’on peut utiliser tantôt pour sauver une banque, tantôt pour sauver le climat. Les Etats bourgeois, y compris le parlement et le gouvernement, ont été créés aux 19e et 20e siècles pour permettre aux entreprises privées de bénéficier de conditions économiques optimales.
Les États ont été créés pour permettre aux entreprises de bénéficier de conditions de concurrence aussi rentables que possible, et non pour offrir aux salariés une vie aussi insouciante et exempte de travail que possible, en harmonie avec l’environnement. Cela n’a pas changé à ce jour. Chaque crise entraîne également une concentration et une centralisation accrues du capital. Chaque crise entraîne également une concentration et une centralisation accrues du capital. Les secteurs économiques et les entreprises qui meurent sont éliminés, mais en même temps, de nouveaux investissements sont réalisés grâce à des aides directes ou indirectes de l’État. Les entreprises sont rachetées et leurs parts de marché sont absorbées. Les « maîtres du marché » (ici UBS) peuvent ainsi concentrer encore plus de richesses et de pouvoir entre leurs mains. Ils essaient en permanence d’augmenter leur productivité (augmentation de la production de biens ou de services dans un temps donné) ainsi que leur rentabilité (taux de profit).
La reprise du CS donne naissance à un colosse financier qui sera encore plus « too big to fail ». Les affirmations des autorités suisses selon lesquelles l’UBS élargie doit encore augmenter ses fonds propres et que les réglementations étatiques du marché financier doivent être encore renforcées n’y changent rien. L’effondrement du CS, qui n’aurait pas dû se produire selon les exigences imposées aux banques depuis la crise financière et économique de 2007/08, montre que ces réglementations restent des tigres de papier pour les grandes banques.
Pour la socialisation du secteur financier !
Le Conseil fédéral a montré qu’il est en principe possible pour un gouvernement d’agir rapidement et de débloquer des milliards lorsqu’il y a le feu et que, par exemple, la chute de l’un des plus grands pollueurs climatiques du pays, le CS, se profile. La grève di climat suisse a donc demandé, à juste titre, dans les réseaux sociaux si nos bases vitales n’étaient pas elles aussi « too big to fail » ? Parallèlement, le comportement de l’Etat suisse montre que celui-ci n’est pas une entité neutre que l’on peut utiliser tantôt pour sauver une banque, tantôt pour sauver le climat. Les Etats bourgeois, y compris le parlement et le gouvernement, ont été créés aux 19e et 20e siècles pour permettre aux entreprises privées de bénéficier de conditions économiques optimales.
Les États ont été créés pour permettre aux entreprises de bénéficier de conditions de concurrence aussi rentables que possible, et non pour offrir aux salariés une vie aussi insouciante et exempte de travail que possible, en harmonie avec l’environnement. Cela n’a pas changé à ce jour.
C’est pourquoi les partis de gauche se trompent complètement d’approche lorsqu’ils appellent à rendre la monnaie de leur pièce aux bourgeois lors des élections au Conseil national – c’est-à-dire au sein du parlement bourgeois – à l’automne. Ce dont nous avons besoin, c’est de construire un contre-pouvoir social : nous avons besoin d’un vaste mouvement social qui rompe avec les règles du jeu des dominants et qui vise stratégiquement la propriété privée des entreprises. L’UBS et le CS ont investi des milliards dans des entreprises et des projets fossiles et nuisibles au climat. De ce fait, les deux grandes banques ont produit deux fois plus d’émissions de CO2 que le reste de la Suisse. Il faut donc retirer aux banques le pouvoir de décision en matière d’investissements. Le secteur bancaire doit être exproprié et mis au service de la société et de la transformation socio-écologique de l’économie.
Nous ne paierons pas pour vos crises : Expropriation de Crédit Suisse et UBS !
Pour la socialisation du secteur financier et une transformation écologique et sociale de l’économie et de la société !